Conversion en liquidation judiciaire

Conversion en liquidation judiciaire

Postée le 7 mars 2013

La violation des règles de procédure sanctionnée par la nullité.
Bulletin d'Aix - Faculté de Droit et de Science Politique d'AIX-MARSEILLE - n° 2012-4, p.159 par Caroline SAYAG

Conversion en liquidation judiciaire :

La violation des règles de procédure sanctionnée par la nullité

Le Tribunal, dans le jugement d'ouverture du redressement judiciaire fixe, conformément aux dispositions de l'article L 621-.3 du Code de Commerce[1], la durée de la période d'observation dont bénéficie le débiteur, qui ne peut être supérieure à 6 mois.

  • Sauf cas très particulier, la durée de la période d'observation ainsi fixée par le Tribunal est de 6 mois.

La période d'observation est notamment destinée à vérifier non seulement  la faculté de la débitrice de faire face à ses charges d'exploitation courantes  avec le chiffre d'affaires réalisé, mais encore celle de dégager une capacité d'autofinancement et/ou un excédent brut d'exploitation suffisants pour envisager un plan de redressement et l'apurement de son passif.

L'article L 621-3 du Code de Commerce autorise le Tribunal à renouveler une fois, pour une durée maximale de 6 mois, cette période d'observation.

A tout moment de la période d'observation, le Tribunal peut, à la demande du débiteur, de l'administrateur judiciaire, du mandataire judiciaire, du ministère public ou d'office,  prononcer la cessation partielle de l'activité ou la liquidation judiciaire s'il apparait que tout redressement est manifestement impossible[2].

Outre cette faculté, et afin de s'assurer de ce que le passif existant au moment de l'ouverture de la procédure collective n'est pas aggravé en cours de période d'observation, le législateur a prévu, aux termes de l'article L 631-15 I du Code de Commerce, que le Tribunal doit, au plus tard au terme d' un délai de deux mois à compter du jugement de redressement judiciaire, ordonner la poursuite de la période d'observation "s'il lui apparait que le débiteur dispose à cette fin de capacités de financement suffisantes".

Dans la pratique, si le tribunal constate lors de ce rendez- vous judiciaire dit "des deux mois", à l'issue de la première période de 6 mois ou encore à n'importe quel moment de la période d'observation soit que le débiteur n'honore pas ses échéances courantes, soit qu'aucune solution de redressement n'est envisageable, il met fin, par un jugement rendu à l'issue de l'audience, à la période d'observation et convertit le redressement en liquidation judiciaire.

La Cour de Cassation a censuré cette pratique, dès lors qu'aucune requête du débiteur, de l'administrateur judiciaire, du mandataire judiciaire ou du parquet n'était à l'origine de la conversion en liquidation judiciaire.

La Haute juridiction considère en effet, au visa de l'article R 631-24 qu'en absence de requête sollicitant le prononcé de la liquidation judiciaire, le Tribunal s'est saisi d'office.

Or, au cas de saisine d'office l'article R 631-4 du Code de Commerce impose que le débiteur soit convoqué à la diligence du greffe, par acte d'huissier et qu'à cette convocation soit jointe la note du président exposant les faits de nature à motiver la saisine d'office.

A défaut, la saisine du Tribunal est nulle entrainant la nullité du jugement de liquidation judiciaire[3].

Cette nullité de fond étant à l'évidence un moyen sérieux de réformation du jugement de liquidation judiciaire au sens de l'article R 661-1 du Code de Commerce, le Premier Président de la Cour d'Appel, saisi d'une demande tendant à la suspension de l'exécution provisoire attachée au jugement de liquidation judiciaire, fait systématiquement droit à celle-ci.

La Cour d'Appel saisie quant à elle de la demande de réformation du jugement de liquidation judiciaire non seulement n'a pas d'autre choix que de constater la nullité du jugement de liquidation, mais encore celle de la saisine du tribunal, ce qui lui interdit d'évoquer l'affaire au fond et la contraint à la renvoyer devant le juge de première instance, sauf à ce que le débiteur lui-même conclue sur le fond à titre principal[4].

La Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE suit exactement  la position de la Cour de Cassation, en suspendant systématiquement l'exécution des jugements ayant converti le redressement en liquidation judiciaire sans que les règles de convocation afférentes à la saisine d'office aient été respectées et en annulant ensuite ces jugements sans évoquer le fond[5].

Afin de contourner cette difficulté, certains tribunaux mentionnent dans le dispositif de leurs jugements ouvrant de redressement judiciaire et/ou autorisant la poursuite d'activité dans le cadre de la période d'observation que lors de la prochaine audience le débiteur devra fournir un certain nombre de documents, précisant qu'à défaut la liquidation judiciaire pourra être prononcée.

Contrairement à ce qu'affirment les juridictions du premier degré, une telle mention ne suffit pas à pallier l'absence de convocation par huissier à laquelle doit être annexée la note du président susvisée.

Caroline SAYAG

Avocat Associé

SCP BOLLET & ASSOCIES


[1] Par renvoi de l'article L 631-7 du Code de commerce

[2] Article L 631-15 II du Code de commerce

[3] Com., 9 février 2010, pourvoi n° 09-10925

[4] Civ. 2, 25 mai 2000 Bull. civ. II, n° 87 

[5] AIX EN PROVENCE, 1er Prsdt, 9 août 2010, n° 2010/417

AIX EN PROVENCE, 1ER Prsdt 19 novembre 2010, n° 2010/577

AIX EN PROVENCE, 8ème Ch. A, 23 juin 2011, n° 2011/454


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